Textes

L’agitation moléculaire en période rose
Par Florence Bridenne

Tous les milieux fluides, montrent cette agitation moléculaire. Cela n’a l’air de rien mais c’est pourtant l’origine et la naissance de toute chose. Puisque rien ne se crée c’est qu’il y a eu transformation. Et c’est ainsi que Francine Petit capte ce moment, ou plutôt, l’instant. Sa pratique, qui s’apparente à un exercice de scientifique, intègre une dimension sensuelle et un rapport physique propres à l’espace biologique. Il y a dans ses œuvres, disons dans ce qu’ils donnent à voir, des résurgences, des nuages et des fantômes. Il y a les absences en creux qui dessinent une surface tangible à l’introspection. Ce sont des méandres de volutes, de volumes, d’un quelque chose en devenir, des ombres portées, des rêves épuisés au confins d’un rose rassurant, bien humain. Car notre spectre visuel étant limité, les pigments vivifient la composition de rehauts, nous assurant qu’il s’agit bien d’une invention.

Pour magnifier la valeur esthétique de ce qui disparaît, Francine Petit le retient. Ses œuvres sont comme une membrane entre soi et le monde, une paupière qui chaque fois qu’elle s’abaisse laisse entre-apercevoir des univers que l’on pense inconnus.

Et pourtant : végétales ou minérales, les agitations moléculaires – biologiques, elles, sont un prétexte pour créer d’étranges corps-fleurs-formes, tendant sur le féminin, au croisement de l’Évolution et stoppées dans des processus dont nul ne connaît le dieu.

Ici Dieu n’a pas sa place ayant trop ralenti le monde scientifique. C’est sans doute au croisement de ces deux polarités et en conséquence, toujours à une même dynamique contradictoire, que l’artiste tente de mettre à la disposition du regardeur un enchevêtrement de signes, fragments et éléments hétérogènes afin de les soustraire, paradoxalement, dans un mouvement simultané, à un trop plein de significations qui pourraient en entraver la portée.

Florence Bridenne – avril 2020

travaille à la galerie Matignon, chargée de communication & marketing au Musée national de l’histoire de l’immigration